[-] Klaqos@sh.itjust.works 1 points 10 hours ago

Suis tombé à plusieurs reprises aussi sur Simon Le Garff, l'algo YouTube semble l'apprécier !

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submitted 12 hours ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/forumlibre@jlai.lu
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submitted 14 hours ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/monde@jlai.lu
[-] Klaqos@sh.itjust.works 2 points 17 hours ago

Mange ton compost - Dalle Béton : https://www.youtube.com/watch?v=Aynu4f-bEbs

Economat Redeyef - Mouhtalat / اكونوما الرديف - مختلط : https://www.youtube.com/watch?v=9-q0EbkTbac

Jon Hopkins - Ritual : https://www.youtube.com/watch?v=6nmwxYmg-Gs

TELEDETENTE 666 - Panne Sexe : https://www.youtube.com/watch?v=46u59w1ulWU

Tropical Fuck Storm - Twoo Afternoons (live) : https://www.youtube.com/watch?v=vTxtZQpS9tM

[-] Klaqos@sh.itjust.works 2 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Je lis un truc en ce moment sur le ressentiment (Ci-gît l'amer) de Cynthia Fleury, dedans elle rappelle la constitution de l'être (1) et de l'avoir (2) avec en parallèle la question de la jalousie (1) et de l'envie (2), ces sentiments étant cultivés pour nous faire courir dans une roue, à la recherche d'un truc infini sans aucun bénéfice si ce n'est que de nous réduire à un poursuite frustrante.

Comme tu le dis bien, ça me paraît normal de s'apaiser avec ces sentiments au fur et à mesure de l'âge - si on arrive à se mettre à l'abri bien sûr.

Un autre truc dans le bouquin concerne parle d'arrêter de se mesurer à ce qu'on ne peut pas (je ne serai jamais aussi rapide que X, intelligent que Y, vif que Z, beau que machin truc), mais qu'on peut choisir de s'augmenter soi-même pour mieux vivre, ça passe par prendre soin des autres, de soi, de bâtir quelque chose qui soit plaisant plutôt que de vouloir détruire.

[-] Klaqos@sh.itjust.works 2 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Il ne s'agit moins d'une remise en cause de la question de planet-score que d'une charte graphique permettant une meilleure lisibilité auprès du consommateur et d'éviter la confusion avec le Nutriscore.

Si j'achète 40 produits je jette un coup d'oeil rapide, si les items sont exactement les mêmes alors je perds du temps et ces labels perdent leur impact et donc leur intérêt.

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submitted 1 day ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/monde@jlai.lu
[-] Klaqos@sh.itjust.works 1 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Bonne nouvelle même si l'association reste entachée d'histoires border genre comme celle du maire de Capbreton ou le financement de Vinciguerra par rapport à Kohler (d'ailleurs un peu de mauvaise foi on pourrait dire que l'animosité d'Attal par rapport à Kohler n'est pas anodine dans cette décision).

[-] Klaqos@sh.itjust.works 2 points 1 day ago

Y'a une effervescence, j'avais plus en tête l'Ouganda et SudAf avec Nyege Nyege mais tu peux chercher aussi sur le label Pan Music comme ici : https://pan-african-music.com/meilleurs-titres-nigerians-de-2023-2/ avec des articles sur le fuji

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submitted 1 day ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/france@jlai.lu

Cela devait être la dernière étape judiciaire préparant sa rédemption, après des aventures cybercriminelles mouvementées commencées à la fin de son adolescence. Cet épilogue est désormais compromis par une fuite en Abkhazie, région séparatiste de la Géorgie sous tutelle russe. Piqués au vif par l’absence d’Augustin Inzirillo, jeudi 5 septembre, les magistrats de la 13e chambre correctionnelle ont condamné cet informaticien autodidacte de 26 ans à une peine de trois ans de prison dont la moitié avec sursis, assortie d’un mandat d’arrêt.

Ce quantum va « bien au-delà des réquisitions du parquet » – trois ans de prison avec sursis –, convient le président du tribunal, Guillaume Daïeff. Mais les juges considèrent que l’escapade du prévenu en Abkhazie, introuvable depuis des mois, est une « fuite ». « Cette proximité avec la Russie », pays notoirement laxiste avec les cybercriminels, « c’est assez intrigant », remarquait un peu plus tôt la substitut du procureur, Audrey Gerbaud. « Cela attire l’attention sur une éventuelle récidive », estime-t-elle. Dans une lettre lue en début de l’audience, Augustin Inzirillo faisait pourtant part de son vif souhait d’être présent à son procès. Mais il arguait ne pouvoir se rendre en Géorgie pour y prendre l’avion à cause d’un problème de visa. « Quand je serai libre de voyager, je serai ravi de me présenter devant vous », concluait-il.

Augustin Inzirillo était poursuivi pour avoir développé sept ans plus tôt un programme malveillant : TinyNuke. Ce malware bancaire a été diffusé de mars à septembre 2018 par des campagnes d’hameçonnage. L’ouverture malencontreuse du lien contenu dans les e-mails reçus par les victimes déclenchait le téléchargement du logiciel, conçu pour récupérer des informations sensibles, comme les couples identifiants-mot de passe, mais aussi pour lancer de manière automatisée des virements en cas de connexion à des sites bancaires.

Selon les dires d’Augustin Inzirillo, ce programme était exploité par un gang de pirates algériens. Le jeune homme affirme avoir été mis en contact avec eux par Hamza Bendelladj, une figure de la cybercriminalité alors en détention aux Etats-Unis. L’enquête a mis au jour une trentaine de virements bancaires frauduleux, dont onze réussis, se soldant par le transfert d’environ 100 000 euros depuis les comptes de sept victimes. Augustin Inzirillo, lui, aurait touché environ 10 000 euros par mois.

« On ramène le jambon et les Leffe Ruby »

« C’est un jeune homme qui s’est brûlé les ailes, plaide son avocat, Robin Binsard. Il était mû par une sorte de reconnaissance, il voulait être repéré, mais une fois en ligne, sa créature, son programme, l’a dépassé. » A l’époque, le jeune homme né en Californie est en effet en pleine dérive. Arrivé dans l’Hexagone à ses 12 ans, il lâche le lycée quelques années plus tard pour un cocktail détonnant : jeux vidéo à outrance et écriture de programmes malveillants.

TinyNuke fait la fierté de l’informaticien autodidacte, au point qu’il en diffuse le code aux yeux de tous sur le site de partage GitHub. Mais cet amour-propre est également à l’origine de sa chute. Comme rappelé à l’audience, vexé par les messages d’alerte sur le réseau social Twitter d’un spécialiste en sécurité informatique de la Société générale, Augustin Inzirillo entame une riche correspondance avec ce chercheur qui le traque, des investigations à l’origine de la procédure judiciaire.

Ces e-mails et ces messages publics ou privés, publiés sur Twitter, ont été lus avec gourmandise à l’audience et révèlent un étonnant mélange de confessions et de blagues. Il y a aussi des insultes, mais Augustin Inzirillo conteste là en être l’auteur. Le jeune homme explique par exemple ne pas vouloir être « un codemonkey », un développeur effectuant seulement des tâches de routine. « Wesh les collègues on se fait un casse-croûte ? On ramène le jambon et les Leffe Ruby », blague-t-il dans un courriel. Un dernier tweet, envoyé le 28 août, prend la forme d’une dernière bravade : on y découvre la photo du passeport d’Augustin Inzirillo, présenté comme le développeur de TinyNuke.

A l’époque, le jeune homme a déjà la suite en tête. Après la Serbie, il a rejoint l’Ukraine. A court d’argent, il peaufine un nouveau programme malveillant, Vareniky, qui va permettre de lancer une vague d’extorsions. Elles vaudront au jeune homme, qui s’est rendu entretemps, une condamnation en novembre 2023 à trois ans de prison, dont deux avec sursis. Un procès encore frais dans la mémoire des juges parisiens. A l’époque, Augustin Inzirillo avait assuré aux juges vouloir reprendre des études pour travailler au plus vite et ainsi rejoindre son épouse vivant à Paris. On connaît la suite.

[-] Klaqos@sh.itjust.works 5 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Ça reste du droit, le périmètre de ces pratiques est plutôt large, le coup du planetscore pourrait rentrer dans l'interprétation de ces dispositions : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069565/LEGISCTA000032220953/

[-] Klaqos@sh.itjust.works 3 points 1 day ago

Me demande si la DGCCRF peut considérer ce type de manipulation comme une pratique commerciale trompeuse.

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Le ton égal et doux de Bernard Noël, comme une sorte de drap qui vient se déposer tout autour de soi. Une fine membrane contre la laideur du monde.

[-] Klaqos@sh.itjust.works 9 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Grosse mode rétro du neo métal en ce moment (même le rap US s'y met en imitant LimpBizkit.genre JPEG Mafia), c'est donc ça vieillir : avoir connu la première vague.

  1. 2, 1 avant de revoir Pleymo et Watcha se reformer

Aussi, c'est marrant de voir la congruence entre le retour de la mode musicale (fin 90s début 2000s) et le style vestimentaire associé (le oversize).

[-] Klaqos@sh.itjust.works 6 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)
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submitted 1 day ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/france@jlai.lu

Léguer une société plus inclusive. Telle est l’ambition affichée des Jeux olympiques et paralympiques, surtout dans une capitale française critiquée pour le manque d’accessibilité de son métro et de ses sites pour les personnes handicapées. Charlotte Puiseux, docteure en philosophie et militante «handi-féministe», alerte sur un certain «discours médiatique» faisant des parathlètes des personnes extraordinaires, occultant autant leur performance que, plus généralement, «les problématiques sociales du handicap».

Que pensez-vous des propos de Teddy Riner qui a qualifié les parathlètes de super-héros ?

L’un des gros problèmes des Jeux paralympiques, c’est la super-héroïsation des athlètes handicapés. Le discours médiatique est celui d’une mise en scène de ces personnes dans des destinées de dépassement de soi, de transcendance de son handicap et de «leçon de vie» au détriment de la performance sportive. Toutes ces expressions, qui partent d’un bon sentiment des journalistes, participent à un discours validiste qui déshumanise les personnes handicapées. Une déshumanisation par le haut, car positive, mais qui les sort de l’humanité. Or, nous nous battons justement pour avoir les mêmes droits et opportunités que les personnes valides, et n’être ni discriminés, ni super-héroïsés. A lire aussi Les Jeux paralympiques, l’heure de rappeler que «les personnes handicapées n’ont pas pour but d’inspirer» Jeux olympiques et paralympiques 1er sept. 2024

L’autre difficulté, c’est que ces discours mettent l’accent sur la volonté des individus, en racontant que les parathlètes qui l’ont voulu s’en sont sortis, ce qui pousse à faire croire que «quand on veut, on peut». Cela occulte les problématiques sociales du handicap. Si on dit que ces personnes handicapées ont réussi par leur volonté, cela voudrait-il dire que si d’autres sont discriminées au travail, dans la recherche d’un logement et si elles n’ont pas de vie affective ou sexuelle, c’est parce qu’elles ne veulent pas assez s’en sortir ? On voit bien qu’on met de côté toutes les discriminations systémiques dans ce discours.

Les Jeux olympiques sont-ils une compétition validiste ?

Oui, dans leur ensemble, les Jeux olympiques sont validistes. Comme il y a une culture de la performance et que les résultats des athlètes handicapés sont moins élevés que ceux des valides, cela discrimine les parathlètes. Je pense qu’il faut donc déconstruire cette compétitivité, cette idée de pousser les corps à l’extrême, de vouloir des performances toujours meilleures, plus grandes, plus hautes. Cela me semble d’autant plus important quand on constate les dégâts que cela peut entraîner sur la santé. Des personnes valides ont déjà fini handicapées à cause de surmenages ou d’excès d’entraînement.

Les JO sont organisés dans une société capitaliste de la culture de la performance et de la compétitivité, sur fond d’enjeux économiques, politiques, de nettoyage social ou de contrôles policiers. C’est la même chose pour les Jeux paralympiques, même si ces derniers ont au moins le mérite de représenter des athlètes handicapés. Mais bien sûr, comme l’imaginaire des spectateurs donne priorité à la performance, ils ne prendront pas la même place que les JO.

Faut-il fusionner les Jeux olympiques et paralympiques pour lutter contre ce problème ?

C’est une question qui revient souvent, mais dont la réponse n’est pas si simple. D’un point de vue de spectatrice, c’est assez frustrant de voir que les Jeux paralympiques sont organisés après et que la couverture médiatique, même si elle tend à s’améliorer depuis Londres en 2012, reste moindre que celle des JO.

Mais comme l’explique la parathlète de badminton Milena Sureau, un mélange des deux Jeux se ferait sûrement au détriment des Paralympiques. Cette dernière prend pour exemple une conférence de presse mélangée, à laquelle elle a participé, et où les journalistes ne se sont tournés quasiment que vers les valides. Si vous mettez un ou une parathlète à côté de Léon Marchand, il ou elle aura beau avoir gagné toutes les médailles possibles, il n’y aura pas de comparaison. On vit dans une société validiste qui accorde plus d’intérêts aux valides, alors fusionner les Jeux risquerait de supprimer cet espace médiatique réservé aux handicapés.

De manière générale, dans nos sociétés néolibérales et capitalistes, on se doit de garder un petit espace pour les cultures minoritaires, que ce soit les personnes handicapées, les personnes queers, ou d’autres catégories. Mais il faut garder en tête que, par définition, les catégories dominantes ne les rendront jamais égales, cela amènerait à leur autodestruction.

Comment appréhender ces Jeux paralympiques, alors ? Faudrait-il les boycotter ?

Je ne sais pas quelle est la meilleure position à adopter, mais je pense qu’il faut avoir pleinement conscience de ce validisme, pleinement écouter les parathlètes et refuser le discours des politiques qui se servent de l’événement. Et nous, personnes handicapées, devons profiter de l’espace médiatique qui est offert pour dénoncer les validistes, le manque d’accessibilité, notamment dans la ville de Paris.

Vous êtes docteure en philosophie. Si on essaie de prendre un peu de distance, comment est-ce que la philosophie grecque abordait ces questions du handicap ?

En Grèce antique, on estimait que les corps étaient représentatifs de l’âme intérieure. Et donc que les personnes étaient handicapées physiquement car leurs âmes étaient mauvaises. Il y a donc un lien qui était fait entre l’âme et le corps. Aujourd’hui, on est encore un peu bloqué sur cette idée. De façon moins brutale sûrement, mais il y a dans l’inconscient collectif l’idée que les déformations physiques sont le reflet d’un mauvais comportement. Ce qui revient à dire que les personnes handicapées sont responsables de leur corps et qu’on peut dédouaner la société. Or renvoyer la question du handicap à l’individu demeure très problématique.

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Un feu tricolore et une note pour informer sur le contenu des aliments. Le Nutri-Score est simple et a prouvé son efficacité : depuis sa mise en place en 2017, les produits dans le rouge ont perdu des parts de marché et ceux classés en vert gagnent du terrain. Les marques ont donc fait des efforts pour alléger la teneur en sucre, en sel ou en gras de leurs denrées.

Mais elles peuvent encore mieux faire : l’actualisation du Nutri-Score, qui vise à les y pousser, est déjà en vigueur dans les pays européens l’ayant adopté mais toujours pas en France. La publication du texte règlementaire détaillant la V2 du Nutri-Score a en effet été mise sur pause depuis la dissolution de l’Assemblée nationale.

Le logo se veut accessible à tous dans les rayons car « l’obésité est un marqueur social qui touche davantage les plus précaires. Les études scientifiques indépendantes montrent qu’il est particulièrement efficace sur les populations défavorisées, qui ont moins accès aux informations nutritionnelles », met en avant Serge Hercberg, épidémiologiste et l’un des créateurs de l’étiquetage coloré.

Sous la pression des consommateurs et consommatrices, près de 1 200 marques ont fini par l’adopter. Même le géant Nestlé a cédé en 2019. Il s’en sert d’ailleurs maintenant dans sa stratégie de communication : un haut dirigeant de Nestlé Europe s’est même affiché en photo avec le « père du Nutri-Score », Serge Hercberg, sur le réseau LinkedIn, pour annoncer que l’entreprise continuera d’arborer le logo sur sa marchandise après la mise à jour.

En revanche, Danone a décidé de l’abandonner pour ses yaourts à boire Actimel, ainsi que ses boissons végétales Alpro, selon les informations de Mediapart. Contacté, Danone n’a pas confirmé à l’heure où nous publions cet article.

« C’est lamentable. Danone continue de mettre en avant le Nutri-Score quand cela met en valeur ses marques mais le retire de celles particulièrement pénalisées par l’actualisation du Nutri-Score. Et pour cause, il s’agit de produits très sucrés qui vont passer de la note A ou B aux notes C, D, voire E », réagit Serge Hercberg. « Ce rétropédalage montre que Danone retourne sa veste quand ça l’arrange », déplore également Audrey Morice, chargée de campagne de l’ONG Foodwatch.

Avec la mise à jour, les boissons végétales à base de soja, d’avoine ou de riz, sont à présent moins bien classées, au grand dépit de Bjorg, leader français de l’alimentation biologique. « Bjorg joue sur un marketing diététique et agit comme si le fait de vendre du bio lui donnait une sorte de blanc-seing pour le reste. Alors que cela ne l’empêche pas de proposer des produits trop sucrés », dénonce Mathilde Touvier, directrice de l’équipe de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), qui a inventé le Nutri-Score.

En réponse, la marque a radicalement décidé d’abandonner le Nutri-Score. Elle le peut : il n’est toujours pas obligatoire de l’afficher sur la face avant des emballages.

Bjorg espère sortir de la photo de classe des bons élèves ni vu ni connu : depuis avril 2023, les emballages de ses produits arborent le Planet-Score à la place du Nutri-Score. Cet indicateur n’a rien à voir puisqu’il mesure l’impact environnemental, mais il utilise la même notation et le même code couleur. « C’est malhonnête. Il ne s’agit pas d’un logo officiel, contrairement au Nutri-Score, et le format graphique est si proche qu’on s’y trompe. Leurs produits sont déclassés en note C, D ou E avec la mise à jour. Mais ils affichent une note A ou B… grâce au Planet-Score, ce qui trompe le consommateur », dénonce Serge Hercberg, qui se lamente : « La capacité d’adaptation des lobbys rend difficiles les mesures de prévention. »

Interrogée par Mediapart, Bjorg répond : « Nos engagements pour la nutrition ne changent pas et nous utilisons toujours le Nutri-Score comme boussole pour élaborer nos nouvelles recettes. Il est toujours affiché sur les sites distributeurs. Et en scannant le code-barres de nos produits, vous pouvez le retrouver facilement avec des applications dédiées. »

Certes. Mais cela n’est pas le choix de Bjorg. Les acteurs de la grande distribution ont effectivement décidé en France d’afficher le Nutri-Score des aliments pour les commandes en ligne, même ceux des marques qui refusent de jouer le jeu. Grâce à cela, il est possible d’avoir accès aux produits majoritairement dans le rouge des marques Ferrero, Mars, Lactalis ou Mondelez International.

Des applications telles qu’Open Food Facts tentent ainsi de pallier le manque de transparence de ces cancres de l’agro-alimentaire, pour les consommateurs et consommatrices volontaires… Mais l’information ne vient pas directement à leurs yeux en poussant le caddie.

Dans la même veine mais au rayon charcuterie cette fois, Fleury Michon a décidé d’abandonner le Nutri-Score visible pour ses jambons les moins bien classés depuis octobre 2021 : un QR code le remplace pour « en savoir plus sur le produit ».

Quant à la gamme de boissons Emmi Caffè Latte, dont la note se dégrade du fait de leur teneur en sucre, elle a elle aussi laissé tomber le Nutri-Score depuis la mi-mars. Interrogé par Mediapart, le producteur assure que la notation plus sévère du nouveau Nutri-Score « n’a pas influencé [sa] décision. La raison principale est que d’autres concurrents de boissons à base de café et de lait n’ont pas introduit le Nutri-Score sur leurs emballages, ce qui ne permet pas de comparaison. De plus, il n’y a pas eu d’harmonisation au sein de tous les pays européens dans lesquels Emmi est présent ».

Une promesse non tenue de l’Europe En effet, seules sept nations européennes, dont la France, se sont converties au Nutri-Score. La Commission européenne avait fait la promesse d’une généralisation, mais « elle ne l’a pas tenue du fait du lobbying de l’industrie agro-alimentaire, qui torpille avec des moyens importants un petit logo coloriel dont le seul objectif est de servir la santé publique », déplore Audrey Morice, chargée de campagne de l’ONG Foodwatch. « Non seulement cela a retardé l’adoption dans plusieurs pays européens, mais cela a aussi affaibli le Nutri-Score dans ceux qui l’ont mis en place, puisque des marques se désengagent », poursuit-elle.

À Bruxelles, ce lobby est soutenu par l’Italie, qui reprend les arguments d’un Nutri-Score qui pénaliserait les produits du terroir comme le fromage. Foodwatch a demandé à la Commission européenne de s’expliquer, ce qu’elle a encore refusé le 28 mai 2024, selon les documents que Mediapart a pu consulter. Pour se justifier, l’instance européenne met en avant auprès de Mediapart « des travaux très complexes ».

Pourtant, même la puissante Fédération du commerce et de la distribution française (FCD), après avoir lutté contre le Nutri-Score à ses débuts, y a adhéré et demande dorénavant à la Commission européenne qu’il soit adopté dans toute l’UE. « Les enseignes rapportent que les autorités italiennes font pression sur elles pour tenter de les empêcher d’achalander sur leur territoire des produits dont l’emballage présente le Nutri-Score. Il faut une harmonisation », plaide Émilie Tafournel, directrice qualité de la FCD.

En Suisse, le leader de la grande distribution, Migros, a décidé d’arrêter de marquer du fer du Nutri-Score ses produits propres. « L’actualisation a pu aider à prendre cette décision, mais nous l’aurions dans tous les cas retiré », assure Tristan Cerf, porte-parole de Migros. Le même qui défendait encore le Nutri-Score en 2022 dans un reportage de la Radio télévision suisse.

« Nos données nous montrent que la clientèle comprend mal le Nutri-Score », justifie-t-il à présent, en admettant ne pas se baser sur une enquête particulière, si ce n’est « les contacts quotidiens avec les clients ». Deuxième argument : mettre à jour le Nutri-Score reviendrait trop cher. Le porte-parole reconnaît pourtant « ne pas avoir réalisé d’estimation des coûts supplémentaires ». Et pour cause, les marques disposent de deux ans pour mettre à jour les emballages. Dans ce laps de temps, la rotation des stocks exige de toute façon des réimpressions.

La portion magique

À la place, Migros ressort des cartons une vieille proposition initialement portée par le « Big 6 » : Coca-Cola, PepsiCo, Mondelez International, Nestlé, Unilever et Mars. Tandis que le Nutri-Score fonde sa notation sur 100 grammes ou 100 millilitres, afin de permettre la comparaison d’un coup d’œil entre les différents produits, les géants de l’agro-alimentaire, eux, préfèrent afficher les valeurs nutritionnelles par portion.

Mais qu’est-ce qu’une portion ? Les plus gros fournisseurs des hypermarchés la définissent unilatéralement alors qu’une portion varie selon l’âge, le sexe, l’activité physique… Ils la mentionnent souvent en complément à l’arrière des paquets et voudraient que ce soit ce système de portion qui permette d’attribuer une note. « À partir du moment où les lobbys n’arrivent plus à bloquer, ils proposent des alternatives », commente Serge Hercberg.

Lactalis constitue un bon exemple à cet égard. Le mastodonte de l’industrie laitière a toujours refusé d’afficher le Nutri-Score, du fait, en particulier, du mauvais classement de ses fromages Camembert Président, Pointe de brie, Bridel et autres Roquefort Société. En 2021, Lactalis a donc sensibilisé les politiques français·es « à l’impact du projet Nutri-Score sur la filière des produits laitiers ». En 2024, Lactalis a consacré entre 200 000 et 300 000 euros pour tenter d’influencer les décideurs français, selon le registre de la HATVP. Également, entre 100 000 et 200 000 euros en lobbying auprès des instances européennes, rien qu’en 2022.

« Cette notion de portion est une manipulation totale pour réduire artificiellement les quantités de gras et de sucre consommées », déplore Chantal Julia, professeure de nutrition et membre du comité scientifique qui a réévalué le Nutri-Score. « Les géants de l’agro-alimentaire choisissent des petites portions alors qu’il est évident que le consommateur lambda en mange au moins le double », dénonce aussi Mélissa Mialon, docteure en santé publique à l’Inserm et autrice du livre Big Food & Cie (Thierry Souccar éditions, 2021).

Par exemple, Ferrero refuse d’apposer le Nutri-Score sur ses produits Kinder, Nutella, Crunch, Tic Tac, etc. Dans un courriel envoyé à Mediapart, le groupe met en avant le système par portion qui lui semble plus juste. Prenons l’exemple des Schoko-Bons de Kinder, qui obtiennent la plus mauvaise note au Nutri-Score – E, selon Open Food Facts. « La portion choisie est un bonbon. Qui s’arrête à un Schoko-Bons ? », interroge Emma Calvert, porte-parole du Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc), chargée de la politique alimentaire.

Twix : un seul doigt coupe-faim Même stratagème utilisé par le géant Mars : la portion correspond par exemple à un seul des deux doigts coupe-faim Twix. Par ailleurs, « les études montrent que c’est plus difficile pour le consommateur de faire le calcul au supermarché sans comparaison possible », rapporte Emma Calvert.

« Pour appuyer leurs positions, les acteurs économiques se basent sur des études scientifiques qu’ils sponsorisent », regrette Serge Hercberg. Migros affirme ainsi avoir défini les portions de ses propres marques en se basant sur « les recommandations de la Société suisse de nutrition (SSN) », qui est en partie financée par les industriels. En tant que membre donateur, Migros lui verse autour de 5 140 euros par an. « Afin de garantir l’indépendance financière de la SSN, différentes sources de financement sont volontairement recherchées. Les cotisations des membres donateurs représentent au total seulement 12 % de nos recettes », se défend la SSN.

Stéphane Besançon, professeur en santé publique au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), a montré en 2023 dans le British Medical Journal que la probabilité qu’une étude ne soit pas favorable au Nutri-Score est vingt et une fois plus forte si les auteurs déclarent un conflit d’intérêts ou si elle est abreuvée par l’industrie agro-alimentaire : « Quand l’industrie finance, elle trouve les résultats qui lui conviennent. »

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submitted 2 days ago by Klaqos@sh.itjust.works to c/monde@jlai.lu

Des badauds flânent sur la promenade du front de mer. Les petites filles sont tirées à quatre épingles, la plupart des femmes portent un hidjab, parfois du dernier cri : vert mordoré ou imitation peau de lézard. De puissants canots pneumatiques à moteur surchargés de familles entières dessinent des arabesques autour des ferrys d’où s’échappe la musique tonitruante des stars égyptiennes Amr Diab ou Akram Hosny. Poupées, reproductions d’AK-47 et grand sabre made in China : les marchands de jouets pour enfants font recette. Ça pourrait être dans n’importe quel pays arabe, et pourtant, nous sommes à Saint-Jean-d’Acre dans le nord d’Israël, un jour d’Aïd el-Fitr qui marque la fin du ramadan. Les Gazaouis vivent sous les bombes à deux cents kilomètres de là. Ici on court, on joue, on rit, on s’interpelle.

Plus d’un citoyen israélien sur six, soit près de 1,7 million sur un total de 9,66 millions, est arabe (1). Les attaques du 7 octobre ont exacerbé les contrastes et les paradoxes de la situation que vivent les membres de cette communauté, qui se définissent souvent comme « Israéliens de citoyenneté mais Palestiniens d’identité ». Certains d’entre eux, bédouins pour la plupart, ont été tués ou pris en otage durant les raids du Hamas. D’autres ont joué un rôle décisif dans les secours (2). Pourtant leur malaise est grand face à la guerre contre Gaza — où beaucoup ont de la famille —, que leurs impôts financent.

On aurait pu penser que les Arabes israéliens — dénomination officielle à laquelle nombre d’entre eux préfèrent l’expression « Palestiniens d’Israël » — se mobiliseraient pour leurs frères vivant dans l’enclave, comme ce fut le cas lors de la seconde Intifada en 2000 ou lors du soulèvement de mai 2021. Mais, en fait, pas vraiment. « Bien sûr qu’on a voulu manifester mais on en a été empêchés, soutient Mme Aida Touma-Suleiman, députée de Saint-Jean-d’Acre et membre du Front démocratique pour la paix et l’égalité (Hadash, communiste). Nous nous étions rassemblés à vingt-cinq dirigeants pour défiler à Nazareth. Les voitures de police ont bloqué notre cortège dès l’entrée de la ville et six d’entre nous ont été arrêtés. » Parfois dénoncés par leurs collègues juifs, des centaines de citoyens arabes ont été interpellés par les forces spéciales de la police, interrogés, placés sous surveillance ou même incarcérés sans procès pour avoir posté sur les réseaux sociaux des critiques, un extrait du Coran, un appel à prier ou des photographies en solidarité avec les Gazaouis. Malgré son immunité parlementaire, Mme Touma-Suleiman, violemment attaquée par l’extrême droite, a été exclue de la Knesset pendant deux mois pour avoir, dit-elle, « cité des témoignages de médecins de l’hôpital d’Al-Shifa à propos du bombardement de l’hôpital, de la mort du personnel médical et de l’odeur de phosphore dans l’air ».

À Haïfa, M. Assaf Adiv, directeur exécutif du syndicat WAC-Maan, qui compte des adhérents arabes et juifs, cherche à expliquer une relative passivité : « Tout d’abord, ils ont peur. Ensuite, la majorité des membres de la communauté arabe estime que le Hamas est une force importante pour les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie occupée mais ils n’ont aucune envie de perdre leur citoyenneté israélienne et les avantages qui en découlent. » Soixante-quinze ans après la fondation de l’État israélien, « ceux de 48 », autre surnom des descendants des 160 000 Palestiniens restés sur leur terre, sont désormais dix fois plus nombreux. Et pour bien comprendre pourquoi leur existence pèse sur l’avenir du pays dont ils sont citoyens, un retour en arrière s’impose.

En 1948, devant la stratégie de terreur menée par les forces israéliennes, quelque 700 000 Palestiniens fuient ou sont expulsés de leur terre natale. « Deux des frères de mon grand-père sont morts durant la guerre de 1948. Lui est parti en Jordanie, d’où il a cependant pu revenir très vite ; mais ses terres lui avaient déjà été confisquées », raconte un militant du nord d’Israël qui préfère garder l’anonymat, dans cette période ultrasensible. À propos de cet exode, la Nakba (« catastrophe » en arabe), l’écrivain et député palestinien Émile Habibi évoquait un « événement qui a vidé nos esprits, effacé les souvenirs de notre mémoire et brouillé les contours de notre monde ». Cette « peur que cela se répète ne nous quitte jamais, pas un jour sans qu’on y pense », confie M. Basheer Karkabi, un cardiologue renommé de Haïfa. Elle détermine au quotidien jusqu’au comportement des Arabes israéliens. Le sentiment persiste que les autorités de Tel-Aviv n’ont jamais voulu l’égalité entre les citoyens.

La déclaration d’indépendance prononcée par David Ben Gourion, le 14 mai 1948, affirme certes que « l’État assurera une complète égalité des droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race et de sexe ». De fait, si le retour à la terre natale est interdit à ceux qui ont fui ou ont été chassés en 1948, et si, à la différence de la population juive, les Arabes israéliens vivent sous un régime d’administration militaire jusqu’en 1966, ils peuvent voter et se présenter aux élections. La Cour suprême — qui peut être saisie par tous les citoyens — protège ces droits. Le nouvel État, du reste, fait de l’arabe une langue officielle. Chaque communauté possède par ailleurs, comme sous l’Empire ottoman, sa propre juridiction pour les questions civiles (mariage, héritage et divorce) et religieuses — ce qui, dans les faits, fragmente une population arabe composée de musulmans (83 %), de Druzes (9 %) (soumis à la conscription, à la différence des autres) et de chrétiens (8 %)…

En droit, un basculement intervient lorsqu’en 2018 le premier ministre Benyamin Netanyahou fait voter une loi fondamentale définissant « Israël comme l’État-nation du peuple juif ». L’esprit « égalitaire » de la déclaration de 1948 semble ainsi annihilé. Le « développement de l’implantation juive » devient « une cause nationale » à promouvoir. La langue arabe, jusqu’alors officielle, ne bénéficie plus que d’un simple « statut spécial ». Saisie, la Cour suprême valide ces dispositions. Selon elle, la loi ne méconnaît pas le principe d’égalité dès lors qu’elle ne retire aucun droit aux non-Juifs.

Son adoption incite tout de même les Arabes israéliens à se joindre au « soulèvement pour la dignité » de mai 2021. Né à Jérusalem, le mouvement fait tache d’huile dans les territoires occupés et les villes mixtes en Israël. En première ligne, Lod, au sud-est de Tel-Aviv. Deux manifestants arabes y sont tués ainsi qu’un Juif. L’état d’urgence est décrété dans cette ville de 83 000 habitants dont 30 % sont d’origine palestinienne. Un « tournant », aux yeux de Mme Fida Shehade, conseillère municipale pendant cinq ans et témoin de la « radicalisation des Juifs suprémacistes de droite, armés par leur ministre [Itamar] Ben-Gvir [chargé de la sécurité nationale], qui multiplient les exactions, incendient [leurs] maisons et voitures sur fond de corruption, de trafic de drogue et d’armes ». Ces extrémistes ont pour mission de « judaïser » la ville avec le renfort de colons venus de Cisjordanie occupée. Marginalisée au sein de l’équipe municipale, Mme Shehade a choisi de ne pas se représenter aux élections locales de février 2024. Et, par précaution, elle a installé huit caméras de surveillance autour de sa maison.

La féministe qu’elle est n’a cependant pas renoncé à s’engager. Elle privilégie désormais le militantisme associatif, contre le « système patriarcal dominant ». Elle dit en effet avoir « perdu espoir à cause des hommes arabes qui ne s’engagent pas assez dans la politique ». Or, souligne- t-elle, « si vous ne pouvez pas parler de politique, vous parlez de religion ». Depuis au moins dix ans, « le registre islamique imprègne de plus en plus le nationalisme palestinien », confirme M. Semaan Ihab Bajjali, prêtre grec orthodoxe à l’église de l’Annonciation de Nazareth. Fondé en 1971, le Mouvement islamique compte désormais deux branches qui se disputent les faveurs de la communauté. La première, le Mouvement islamique « du nord », refuse un système politique dominé par les Israéliens et rejette toute participation électorale. « En 2015, notre mouvement a été interdit par les autorités, qui nous ont mis sous pression à tous les niveaux, social, politique et économique. Nous devions par exemple constamment payer de nouvelles taxes pour nos institutions, raconte le cheikh Saleh Lutfi, qui dirige un centre social à Umm Al-Fahm. Nos membres sont constamment interpellés et interrogés. Beaucoup d’entre eux sont en prison. Et depuis le 7 octobre, c’est pire. Les Israéliens ne nous traitent pas comme des citoyens, c’est une relation d’occupants à occupés. » Pour autant, reconnaît-il, « 20 % des mosquées sont financées par le gouvernement ». malgré soixante-quinze ans de cohabitation, seuls 5 % des juifs mariés le sont avec des non-juifs

La branche dite « du sud », Raam, participe, elle, aux élections. Dirigée par M. Mansour Abbas, elle a rejoint la Liste unifiée entre Arabes et Juifs (composée de candidats communistes du Hadash, de nationalistes du Taal et du Balad, et d’islamistes de Raam), qui obtient treize députés aux législatives de mars 2015 et devient la troisième formation à la Knesset derrière le Likoud et les travaillistes (3). Mais, en 2021, M. Abbas fait cavalier seul et quitte cette liste unifiée qui se sera maintenue bon an mal an près de sept ans. Les quatre députés de sa formation intègrent alors — c’est une première — la majorité parlementaire, une coalition hétéroclite allant d’un extrême à l’autre, mise sur pied par le premier ministre colon Naftali Bennett pour faire tomber M. Netanyahou. « Mansour Abbas admet volontiers des préoccupations communes avec les partis juifs religieux et la droite conservatrice, relève l’historien Jean-Pierre Filiu dans un récent ouvrage (4). Il s’inscrit dans la droite ligne de la Mujamma de Cheikh Yassine [une organisation caritative créée par le fondateur du Hamas à Gaza en 1973], qui préférait il y a un demi-siècle collaborer avec les autorités israéliennes plutôt qu’avec les nationalistes palestiniens. »

Les Arabes israéliens furent toutefois les grands absents des cortèges de 2023. Les centaines de milliers de manifestants juifs n’ont pas vraiment cherché à les inclure lorsqu’ils ont défilé contre le projet de réforme judiciaire de M. Netanyahou. Les Arabes n’ont pas non plus — ou très rarement — participé aux grands rassemblements qui ont suivi les attaques du 7 octobre pour obtenir la libération des otages et la démission du premier ministre. Cette discrétion n’est pas nouvelle. Elle s’inscrit dans un long processus d’érosion qui affecte la participation de cette minorité à la vie électorale de son pays. Au plus haut, en 1955, 91 % de ses membres votaient ; au plus bas, en 2021, ils n’étaient plus que 44,6 %. Cela se ressent à la Knesset. Occupant jusqu’à quinze sièges, actuellement dix, ces députés arabes font montre d’une certaine impuissance à contrer les discriminations subies par leur électorat, en particulier dans le domaine foncier, clé de voûte du système de ségrégation appliqué aux Arabes israéliens.

Dans la petite ville de Maghar, depuis le toit-terrasse de la maison de M. Ayman Whip on dispose d’une vision d’ensemble. Au premier plan, les maisons du quartier. Puis une étendue de champs, dont certains propriétaires, arabes, ont été expropriés, tandis que d’autres se sont vus interdire d’y cultiver le zaatar (un mélange d’épices à base de thym) : afin que « les coopératives juives de la région [en] gardent l’exclusivité », selon la conseillère municipale druze Noha Bader ; pour « éviter la surexploitation anarchique des terres », selon un agronome juif israélien. Au troisième plan, sur le flanc de la colline rocheuse, des bulldozers creusent une large saignée de terre ocre. L’emplacement de la future route, qui mènera à son sommet et permettra d’accéder aux centaines de nouveaux logements pour des Juifs ceinturant Maghar et les villages environnants.

Mis sur pied dès la création d’Israël, le système juridique, complexe, décide de qui peut vivre où, et permet l’expropriation des descendants de « Palestiniens de 1948 ». Des centaines de localités ont ainsi été détruites et rayées de la carte. Leurs noms et populations judaïsés. Plus de 150 000 hectares ont été confisqués aux Arabes au profit des agglomérations juives. Toujours situées en surplomb des villages arabes dont Israël souhaite limiter le développement, ces constructions entravent toute perspective et s’imposent au regard, comme une présence définitive. En 1976, une grève générale pour protester contre l’expropriation de nouvelles terres et la dépossession de la population locale avait fait l’objet d’une sanglante répression. La police avait alors tué six manifestants arabes. Si chaque année, le 30 mars, la « journée de la terre » commémore ce drame, rien n’a vraiment changé. La prophétie formulée en 1980 par Itzhak Shamir — alors ministre des affaires étrangères — semble s’être réalisée : « La Galilée [région du nord d’Israël] ne sera pas la Galilée des goïm [“gentils”, ou non-juifs], mais celle des juifs (5). »

Du même toit-terrasse, en lisière de la ville, on aperçoit trois grandes et imposantes nouvelles maisons : des constructions illicites édifiées par des voisins arabes. « Voilà des années que les autorités refusaient de leur accorder un permis. La terre est très chère et il n’y en a quasiment pas à vendre. Alors ils ont décidé de passer outre. ‘‘Ce sont nos champs d’oliviers, on fait ce qu’on veut dessus’’, disent-ils, raconte M. Whip. Ils risquent de grosses amendes et surtout que les autorités donnent l’ordre de démolir. » Pour se prémunir, l’un des propriétaires a d’ailleurs déployé un large drapeau israélien sur la façade de la maison.

Les localités arabes manquent aussi de terrains pour construire des établissements scolaires. « Nous avons six écoles primaires, deux collèges et deux lycées. Le premier collège, nous l’avons construit sans autorisation car nous ne pouvions plus attendre ! », raconte Mme Bader, qui a fait de l’éducation la priorité de son mandat au conseil municipal de Maghar.

Pharmacienne, Mme Lamis Mousa est l’une des quatre Arabes (sur dix-sept membres) à siéger au conseil municipal de Nof HaGalil, la ville juive édifiée en surplomb de Nazareth. Elle y a acheté une maison, et d’autres familles de classes moyennes voire aisées l’ont rejointe au fil des années. Faute d’école arabe dans cette cité, « nous devons envoyer nos enfants chez les missionnaires de Nazareth et même, pour un petit nombre d’entre eux, dans les établissements arabes des villages environnants, explique Mme Mousa, car la demande d’ouvrir une structure adaptée aux besoins de la population arabe n’a pas été approuvée. Sans doute du fait d’une décision gouvernementale, en plus de la pression exercée sur le maire par les groupes racistes de la ville ».

Ce déficit d’écoles a aussi des implications pour les enseignants : chaque année, ce sont des centaines d’instituteurs et de professeurs arabes qui intègrent le système éducatif juif, où ils enseignent en hébreu. Ils constitueraient désormais 3 % du corps enseignant.

Une situation également paradoxale du côté des élèves car, explique M. Adiv, « d’un côté, depuis dix ans, nous avons un gouvernement de plus en plus à droite, qui exprime haut et fort sa haine des Arabes et menace de s’en débarrasser. D’un autre côté, ce même gouvernement a, sous la direction de Netanyahou, investi des milliards dans les infrastructures et l’éducation dans les communautés arabes, en atteignant un niveau d’investissement sans précédent de la part de n’importe quel gouvernement auparavant. Avant même l’adoption du “plan quinquennal 922” en 2016, l’État a élaboré un programme visant à promouvoir et à encourager l’intégration des étudiants arabes dans le système d’enseignement supérieur israélien (6) ».

Cela a permis de doubler le pourcentage de femmes d’origine palestinienne titulaires d’un premier diplôme en l’espace de dix ans. Beaucoup d’Israéliens parlent même de « révolution » dans l’enseignement supérieur. Malgré l’examen d’entrée à l’université en hébreu, toujours plus difficile pour les étudiants non hébréophones, la proportion de ces derniers préparant un premier diplôme dans les universités et autres établissements du supérieur israéliens a doublé, passant de 22 268 en 2010 à 47 936 en 2021, tandis que le nombre d’Arabes préparant un deuxième diplôme a plus que triplé, passant de 3 270 à 11 665 au cours de la même période. Un deuxième plan quinquennal, doté d’un budget de près de 10,8 milliards de dollars, a été adopté en 2021 par le gouvernement de MM. Bennett et Yaïr Lapid. « Mais à la suite de la guerre à Gaza, le gouvernement israélien actuel a procédé à des coupes dans le budget de l’État [en février 2024], dont des réductions disproportionnées sur les budgets alloués aux citoyens arabes », regrette M. Adiv.

Arabes et Juifs grandissent aujourd’hui dans des établissements séparés car le système éducatif primaire et secondaire se répartit selon quatre catégories : écoles publiques juives laïques (3 à 18 ans), écoles juives religieuses, écoles arabes, écoles ultraorthodoxes juives. Désormais, « c’est souvent à l’université qu’Arabes et Juifs se rencontrent pour la première fois », note M. Karkabi. Une enseignante à l’Université hébraïque de Jérusalem qui souhaite préserver son anonymat nuance : « Il y a peu d’interactions entre les étudiants juifs et arabes, et, depuis le 7 octobre, c’est encore plus marqué. » Malgré soixante-quinze années de cohabitation, seuls 5 % des Juifs mariés le sont avec des non-Juifs, un pourcentage qui monte à 42 % dans la diaspora (7). En 2015, au nom de la préservation de la « pureté juive », les autorités ont interdit aux lycées l’étude du roman hébreu de Dorit Rabinyan Gader Haya (Am Oved, Tel-Aviv, 2014) (8), qui raconte la liaison d’une Juive israélienne avec un Palestinien.

Enquêter sur la situation des Arabes en Israël, c’est rapidement entendre votre interlocuteur juif israélien invoquer un certain nombre de réussites individuelles : l’économiste Samer Haj-Yehia, qui pilote à Tel-Aviv le conseil d’administration de la banque Leumi depuis 2019 ; le juge Khaled Kabub à Jérusalem, qui siège aux côtés de quatorze pairs juifs à la Cour suprême ; ou encore Mme Mouna Maroun à Haïfa, première Arabe, chrétienne, élue rectrice d’une université israélienne. Derrière ces success stories, la réalité demeure cependant moins radieuse, malgré quelques progrès. Un système judiciaire parallèle dominé par des chefs tribaux et des cheikhs

En 2022, on estimait que 40 % des familles arabes en Israël vivaient sous le seuil de pauvreté. Et le fossé est grand entre le salaire moyen d’un Juif israélien, 14 035 shekels (3 467 euros) et celui d’un Arabe israélien (8 973 shekels). Rares sont les personnes d’origine palestinienne qui occupent des postes d’encadrement : en 2019, 4,9 % des hommes, contre 12,8 % côté juif (respectivement 2 % et 5,7 % pour les femmes) ; la représentation des Arabes dans les conseils d’administration des entreprises s’améliore, elle est passée de 1,2 % en 2000 à 12 % en 2018. De même, en vingt ans, le pourcentage de fonctionnaires arabes israéliens a triplé, passant de 4,8 % à 13,2 %. « Pour ce qui est de la santé et de l’université, on est plus ou moins à égalité, considère M. Karkabi, par exemple, il y a 25 à 30 % d’Arabes israéliens dans le corps médical et une forte présence aussi dans la police, mais tout ce qui touche directement ou indirectement à l’armée nous est barré. »

Aux inégalités de revenus et en matière d’accès aux postes de responsabilité s’ajoute une insécurité plus grande pour les citoyens israéliens d’origine palestinienne. En 2023, rapporte l’organisation pour l’égalité des droits Abraham Initiatives, 222 parmi eux ont été tués, soit quasiment le double par rapport à 2020 (9). À la suite de la mort de son ami d’enfance, tombé sous une balle tirée à bout portant dans leur ville natale de Lod, le rappeur et militant Tamer Nafar a sorti un tube, Go There, sur le thème de la violence et de la criminalité dans sa propre communauté. Depuis 2000, on estime à 1 574 le nombre d’Arabes israéliens tués, 68 par la police et 1 506 par d’autres citoyens arabes. Deux tiers de ces drames résultent de luttes entre organisations criminelles ou de vendettas entre clans et familles. Seuls 10 % des incidents criminels entre Arabes donnent lieu à des enquêtes de police et très peu d’entre eux aboutissent à la traduction en justice d’un suspect.

La négligence des forces de l’ordre se combine à une autre explication, selon M. Adiv : « La nette tendance de la population arabe à s’isoler de l’État. Ce phénomène s’est accentué après la seconde Intifada, à partir de l’année 2000. Il a permis la création d’un système judiciaire parallèle, dominé par des chefs tribaux ou des cheikhs, et fondé sur l’idée, au cœur des forces militantes nationalistes et islamiques qui dominent la rue depuis deux décennies, que ceux qui collaborent avec la police ne font plus partie de notre communauté. »

Pour prendre le pouls de la communauté arabe, il faut aussi se déplacer à Haïfa, souvent présentée comme un exemple de coexistence entre citoyens juifs et d’origine palestinienne. À quelque cent quarante kilomètres à vol d’oiseau de la frontière libanaise, la ville est à portée des tirs de roquettes du Hezbollah, qui se multiplient ces derniers mois. Plusieurs centaines d’habitants, Arabes et Juifs, ont, ensemble, entrepris de faire l’inventaire des abris, de les inspecter et de les remettre en état. « Le 7 octobre n’a pas fait exploser le modèle de Haïfa, qui n’était tout de même pas idéal avant, juge M. Karkabi, membre du forum « Haïfa for us all » (« Haïfa pour nous tous »), mais il a abîmé ceux qui avaient foi dans la coexistence. » Des parents juifs ont notamment retiré leurs enfants du projet expérimental d’école mixte (financé à 90 % par l’État, à 10 % par les parents), dont il n’existe que trois unités dans le pays.

Début juin, M. Yona Yahav, le nouveau maire (ex-travailliste) de la ville, a suggéré aux manifestants arabes d’aller défiler à Jérusalem plutôt qu’à Haïfa afin de ne pas perturber la tranquillité de sa cité ; et, au lieu de blâmer le comportement brutal de la police, il a accusé les manifestants de scander des slogans anti-israéliens. En réponse de quoi M. Karkabi ainsi que trente autres citoyens (juifs et arabes) ont signé une lettre publique dénonçant cette prise de position. Le cardiologue le déplore, « 7 octobre ou pas, au niveau national, l’ensemble du spectre politique penche de plus en plus à droite et je crains que cela n’épargne pas Haïfa ».

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J'ai un peu du mal à adhérer à sa philosophie mais en revanche pour moi c'est une sorte de rappeur avec 50 punchlines secondes, un débit de mitraillette et une richesse verbale assez hallucinante en toute décontraction.

Autre vidéo, une conférence sur Bergson où plus à l'aise car monologue on perçoit mieux les intonations et flexions : https://youtu.be/0aeXqS9GEAo?si=4spCD9sTPCjMtBFA

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La Chine ne sait plus quoi faire de son acier. Avec une consommation intérieure en berne, liée à la crise de l’immobilier et à l’arrêt de nombreux chantiers, elle ne peut maintenir sa gigantesque production qu’en exportant massivement vers le reste du monde. Selon les prévisions du cabinet Kallanish Commodities, basé à Londres, les exportations devraient augmenter de 5,8 % en 2024, et atteindre leur plus haut niveau depuis 2016. L’Asie, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Amérique latine devraient absorber 12 % de la production chinoise en 2024 (contre 6 % en 2022).

Pour un pays qui produit la moitié de l’acier mondial, soit plus de 900 millions de tonnes, ces pourcentages se traduisent par des volumes colossaux. Il écoulera cette année dans le monde près de 100 millions de tonnes d’acier, l’équivalent des deux tiers de la production européenne.

Cette déferlante s’ajoute à celle des véhicules électriques, des batteries, des panneaux solaires ou des éoliennes et qui résulte de la faiblesse de la demande intérieure du géant asiatique. « La surproduction sidérurgique chinoise est devenue un problème mondial », s’inquiète Axel Eggert, directeur général d’Eurofer, l’association qui représente les intérêts des sidérurgistes européens.

« Dumping chinois » De nombreux pays cherchent à s’en protéger en érigeant des barrières douanières. Le Canada a annoncé, fin août, une surtaxe de 25 % sur l’acier et l’aluminium en provenance de Chine, à compter du 15 octobre. En guise de rétorsion, Pékin a lancé, mardi 3 septembre, une enquête antidumping sur le colza canadien. Les droits de douane brésiliens ont aussi été rehaussés à 25 % au printemps. Quatrième producteur mondial, Nippon Steel a réclamé au gouvernement japonais, fin août, des mesures similaires. Le Vietnam, qui a vu ses importations d’acier chinois doubler en un an, a lancé en juin une enquête antidumping.

Mais une hausse des tarifs douaniers ne suffit pas toujours à limiter les dégâts. Au Chili, l’aciérie Huachipato (2 700 salariés), a annoncé il y a un mois la suspension de ses activités en raison de difficultés financières, malgré la décision des autorités chiliennes de surtaxer temporairement l’acier chinois de 25 % à 34 %. Une décision justifiée par « l’intensification du dumping chinois » qui l’empêchait de maintenir des prix compétitifs. En 2023, 10 millions de tonnes d’acier chinois ont déferlé sur l’Amérique latine, soit un bond de 44 % par rapport à l’année précédente.

« La surproduction chinoise s’écoule partout dans le monde, observe Tomas Gutierrez, analyste au cabinet Kallanish Commodities, alors que pendant la dernière crise de 2015, l’Asie du sud-est en avait absorbé la quasi-totalité car sa production était faible. » La hausse des exportations chinoises se concentre toutefois au Moyen-Orient et en Asie du sud-est, où la demande est la plus dynamique. « Mais elles touchent aussi l’Europe par ricochets, car elles inondent les pays tiers comme la Corée du Sud, le Japon ou Taïwan, ce qui oblige leurs industriels à écouler leur production chez nous », note Axel Eggert. Eurofer exige de Bruxelles une hausse des tarifs douaniers qui s’applique à tous les pays enregistrant une surproduction.

« La Chine ne représente que 2 % à 3 % des importations sidérurgiques européennes, relativise Marcel Genet, fondateur de la société Laplace Conseil, ses prix très compétitifs nous menacent surtout parce qu’ils rognent nos parts de marché à l’international. » L’expert cite l’exemple de l’Indonésie « qui achetait beaucoup aux Pays-Bas avant de se tourner vers la Chine, dont la production est 20 % moins cher et de bonne qualité. »

Baisse des coûts En un an, les cours mondiaux de l’acier ont chuté de 13 %. « La quasi-totalité de l’industrie chinoise ne génère aucune trésorerie opérationnelle, voire perd de l’argent », constatent les analystes de Goldman Sachs dans un rapport publié début août. Le groupe chinois Angang Steel Co a publié, lundi 2 septembre, une perte de 140 millions de dollars (127 millions d’euros) au deuxième trimestre 2024. Hu Wangming, le président du plus grand producteur d’acier au monde, le chinois Baowu Steel Group, prévenait mi-août que la demande mondiale entrait dans un « rude hiver », « plus long, plus froid et plus difficile à supporter que ce que nous avions prévu ».

« Les conditions actuelles du marché ne sont pas viables : la production excédentaire de la Chine par rapport à la demande se traduit par des marges très faibles et des exportations agressives », s’est inquiété le géant européen ArcelorMittal le 1er août, lors de la publication de ses comptes semestriels, ajoutant que « les prix de l’acier en Europe et aux États-Unis sont inférieurs au coût marginal ».

La baisse des prix ne fait pas que des perdants. Elle améliore la compétitivité de nombreux industriels gourmands en acier : mâts d’éoliennes, véhicules électriques, parcs de panneaux solaires… L’acier représente par exemple 10 % du coût de production d’une automobile. Dans une étude publiée en août, deux économistes du Fonds monétaire international (FMI), Lorenzo Rotunno et Michele Ruta, ont calculé que les exportations de voitures chinoises ont bondi de 3,5 % grâce à une hausse des subventions accordées aux producteurs sidérurgiques du pays entre 2015 et 2022.

« La crise pourrait être longue, car la croissance chinoise va être moins consommatrice d’acier et Pékin ne semble pas décidé à réduire significativement sa production », prédit Tomas Gutierrez. Contrairement à la précédente crise de 2015, Pékin ne lancera pas de grands projets d’infrastructure pour soutenir la demande. « La surcapacité de production mondiale d’acier devrait devenir de plus en plus problématique dans les années à venir », a averti l’Organisation de coopération et de développement économiques dans un rapport publié en juin, ajoutant que « les investissements dans de nouvelles capacités de production se poursuivent à un rythme soutenu alors que la demande mondiale d’acier reste atone ».

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Selon des documents internes révélés par notre partenaire Mediacités, le service public de l’emploi va augmenter de 400 millions d’euros le recours à la sous-traitance privée, au prix de l’accompagnement des usagers. De plus, ces derniers ne pourront plus se défendre avant d’être sanctionnés.

Toulouse (Haute-Garonne).– L’emploi étant une activité rémunérée dans un cadre juridique garantissant protections sociales et revenus, alors que le travail se résume à la production d’un bien ou d’un service par un effort physique et intellectuel, l’évolution sémantique de Pôle emploi à France Travail en disait long sur les intentions du gouvernement.

Ce changement de philosophie transparaît dans les dizaines de documents internes que Mediacités a pu consulter. Ils témoignent de la mutation en cours de ce service public depuis le vote de la loi « pour le plein emploi », le 18 décembre 2023.

Première découverte : le gouvernement persiste et signe dans sa volonté de libéraliser les services publics. Entre 2018 et 2023, Pôle emploi a fait exploser le recours à la sous‐traitance pour ses missions d’accompagnement. De 250 millions d’euros de budget en 2018, celui-ci est passé à 550 millions d’euros en 2022, puis à 650 millions d’euros en 2023. Avec France Travail, une nouvelle externalisation massive est prévue.

Un accompagnement dédié à la reprise rapide d’emploi va être sous‐traité à des opérateurs privés. D’une durée de six mois, ce parcours concernerait entre 700 000 et 900 000 demandeurs et demandeuses d’emploi chaque année. À 448 euros la facture par usager, le montant total oscillera entre 313 et 403 millions d’euros par an. Actuellement expérimenté dans plusieurs agences, ce dispositif a déjà coûté 36 millions d’euros à France Travail.

Les sous‐traitants « s’en frottent par avance les mains », dénonce, dans un communiqué, le syndicat SNU‐FSU de France Travail, qui estime que 6 285 conseillers supplémentaires pourraient être recrutés nationalement avec la même enveloppe. Sur le même ton, le député socialiste Arthur Delaporte dénonce « une gabegie d’argent public ». « Un euro dépensé dans la formation privée est moins efficace qu’un euro dépensé pour le service public de l’emploi, car l’accompagnement par les acteurs privés est de moins bonne qualité que celui qui peut être fait par le service public », souligne ce parlementaire, citant à l’appui un rapport de la Cour des comptes.

Pression du chiffre sur les prestataires... Très impliqué dans les débats lors du vote de la loi, le député du Calvados explique cette externalisation par « l’impréparation » du gouvernement et son incapacité à « absorber la montée en puissance du dispositif » : « 400 millions d’euros, cela veut dire que le service public de l’emploi est sous l’eau et qu’il se recentre sur la gestion du système et le contrôle, tandis que la formation et l’accompagnement sont faits par le privé, analyse‐t‐il. C’est une réforme qui est soit mensongère dans ses ambitions, soit totalement irréaliste, parce que non budgétée suffisamment. Si on veut vraiment la mettre en place, cela va coûter de l’ordre de 10 milliards d’euros par an. »

Même regard critique du côté d’Hadrien Clouet, député La France insoumise (LFI), lui aussi très mobilisé sur le sujet. « On est sur un business à caractère lucratif qui est à hauteur de 1 milliard d’euros sur le dos des chômeurs », calcule‐t‐il, soulignant la divergence d’objectifs entre des prestataires privés recherchant le profit et des agents publics préoccupés par le maintien d’un « niveau de salaire digne et acceptable » sur le marché du travail.

Les prestataires privés auront en effet un intérêt financier à inciter les demandeurs et demandeuses d’emploi à trouver un travail. Selon les documents consultés par Mediacités, la facturation de la prestation sera réduite de 40 % à 85 % si la personne accompagnée ne retrouve pas d’emploi.

... et les demandeurs d’emploi De quoi inciter ces prestataires à faire pression sur les demandeurs d’emploi pour qu’ils acceptent au plus vite un travail, quitte à « conduire les chômeurs à diminuer leurs exigences », selon Hadrien Clouet. « On sait qu’il est plus long d’embaucher en CDI qu’en CDD. Si vous rémunérez une boîte privée à la performance sur le retour à l’emploi et qu’elle veut gagner de l’argent, elle va mettre les gens en emploi précaire parce que c’est plus rapide », craint le député LFI de la première circonscription de Haute‐Garonne.

Autre risque, selon ce sociologue du travail : privilégier les demandeurs d’emploi les plus employables aux dépens des publics les plus en difficulté. « Le chiffre d’affaires des opérateurs privés dépendra de leur capacité à avoir une rotation importante des demandeurs d’emploi accompagnés pour être payés. Il leur faudra donc se concentrer sur les profils qui partent vite et peuvent être rapidement rentables et renouvelés », alerte‐t‐il.

Contactée à ce propos, la direction de France Travail a d’abord indiqué vouloir répondre, puis a rétropédalé à la lecture de nos questions. Paul Christophe, député Renaissance et rapporteur de la loi pour le plein emploi, n’a pas souhaité réagir lui non plus.

Des accompagnements limités dans le temps Le cœur des transformations du service public de l’emploi concerne la nature de l’accompagnement des bénéficiaires. Actuellement, tous les demandeurs d’emploi, quel que soit leur degré d’autonomie, sont suivis jusqu’à ce qu’ils retrouvent un poste, sans limitation de durée. À l’avenir, ce ne sera plus le cas. France Travail teste deux nouveaux modèles de gestion de ses listes d’inscrits, dont la caractéristique commune est de limiter dans le temps les accompagnements.

Selon nos sources, le modèle organisationnel privilégié prévoirait de limiter à vingt-quatre mois l’accompagnement des usagers et usagères de France Travail. Cette durée est obtenue en faisant la somme de tous les accompagnements proposés pour régler les « freins périphériques à l’emploi », selon le jargon administratif (garde d’enfants, manque de qualification ou de mobilité, mais aussi épuisement professionnel, dépression ou addiction).

Pour les personnes les plus en difficulté, le suivi par le service public est actuellement sans limitation dans le temps. Il s’arrêterait au bout de douze à dix-huit mois, d’après les documents consultés par Mediacités, et sera en grande partie sous‐traité à des opérateurs privés. Enfin, un dernier type de suivi concernant les profils « immédiatement employables » pourra durer « de trois à six mois ». Les documents en notre possession ne précisent pas si ce dispositif sera renouvelable.

Que deviendra une personne en demande d’emploi, passé ce délai ? À ce jour, aucune organisation syndicale n’est en mesure de répondre à la question. Là encore, ni France Travail ni le député rapporteur de cette réforme n’ont voulu nous éclairer.

Des centaines de milliers de personnes sont potentiellement concernées. 1,2 million de demandeurs d’emploi de catégorie A, B et C sont inscrits depuis vingt‐quatre mois et plus, et 797 000 depuis trois ans et plus, selon les données de France Travail.

Des contrôles plus durs et plus nombreux Autre loup levé par Mediacités, la direction de France Travail veut augmenter le nombre de contrôles des usagers et durcir leurs modalités, au nom d’un « gain de productivité ». Depuis 2015, des questionnaires sont envoyés aux demandeurs d’emploi pour vérifier leur implication dans la recherche d’un travail. Les sanctions encourues vont de la « redynamisation » de l’usager, selon le jargon de France Travail, qui se matérialise par un suivi renforcé de son dossier, à la suspension temporaire de son accès au service de l’emploi (et aux allocations) ou à sa radiation pure et simple.

En 2023, les 520 000 contrôles réalisés ont abouti à 90 000 radiations. À l’avenir, les équipes dédiées au contrôle devront en assurer 600 000 en 2025, et 1,5 million en 2027, comme le rapporte Le Monde. Pour parvenir à cet objectif, une note interne, datée de juin 2024, incite les conseillers et conseillères à augmenter les signalements. Dans certaines antennes régionales de France Travail, comme en Occitanie, des services ont reçu la consigne claire d’augmenter de 30 % les contrôles dans certains cas.

Au‐delà de ces chiffres, une « rénovation » des modalités de contrôle est à l’étude sur tout le territoire et pourrait être appliquée début 2025. À ce jour, le contrôle accorde un droit de réponse au demandeur d’emploi : après avoir rempli un questionnaire, il peut défendre sa bonne foi au cours d’un rendez‐vous téléphonique systématique avant la clôture de la procédure.

À lire aussi France Travail : des erreurs de dates qui coûtent très cher Désormais, les agent·es de France Travail seront autorisé·es à sanctionner un chômeur sans même le consulter. Non seulement le rendez‐vous de clôture ne sera plus systématique, mais au nom une fois encore du « gain de productivité », la nouvelle procédure permettra de « faire l’économie de l’envoi du questionnaire afin de gagner à minima dix jours », précisent les documents internes consultés par Mediacités.

Les conditions de radiation seront désormais appréciées au regard d’une grille de « faisceau d’indices » : l’agent·e chargé·e du contrôle analysera pour ce faire l’ensemble des données connues de France Travail et de sa plateforme de mise en relation avec les employeurs, notamment le nombre d’offres auxquelles le demandeur d’emploi aura postulé. Problème, et non des moindres : des secteurs professionnels entiers n’utilisent pas ces outils pourtant à leur disposition.

Selon les propres données de France Travail, un plombier ou un serveur en recherche d’emploi favorisera avant tout son réseau personnel à renfort de coups de téléphone, tout comme un grand nombre de demandeurs d’emploi concentrent leurs recherches via des plateformes privées comme Indeed, dont les données ne sont pas transmises à France Travail. Pour elles et eux, le droit à être accompagné risque de fondre comme neige au soleil, même si la direction promet une « période contradictoire », leur donnant droit à contester leur radiation.

Les trois premiers syndicats représentatifs (CFDT, FO, SNU) sont vent debout contre les profondes mutations en cours, craignant une précarisation des demandeurs d’emploi à travers leur mise au pas vers des offres d’emploi précaires. Le Syndicat national unitaire évoque « une attaque massive faite à la liberté de chacun de choisir son avenir professionnel ». Même le Snap, syndicat d’entreprise favorable à la loi pour le plein emploi, est critique. Les agent·es de l’opérateur de service public restent « dans le flou et inquiets par l’incohérence entre le nombre d’agents et la masse de nouvelles inscriptions à venir », selon Laurent Merique, son secrétaire général.

Du côté de l’opposition de gauche, Arthur Delaporte pointe « une dégradation du dialogue dénoncée chaque année par le médiateur de Pôle emploi » et « la perpétuation d’une logique de contrôles renforcés pesant sur un individu qui a moins accès à ses droits et peut moins se défendre ». Pour sa part, Hadrien Clouet doute de la légalité même de cette évolution. « D’un droit des faits où l’usager a des pièces à fournir, on bascule à un droit des situations, où ce qui compte c’est la manière dont l’agent de contrôle estime que vous avez fait un effort ou pas », analyse‐t‐il, en pronostiquant la saisine des tribunaux sur cette question.

Intelligence artificielle et algorithmes de contrôle Parallèlement à ces changements, la direction de France Travail planche sur l’introduction de l’intelligence artificielle dans ses mécanismes. L’objectif est double : réaliser « des gains d’efficience et de temps » pour les agent·es et améliorer « la relation avec les demandeurs d’emploi et les entreprises ».

« ChatFT », un outil développé sur le modèle de ChatGPT, est ainsi déployé depuis juin. Il doit permettre d’accélérer certaines tâches, comme « la production de différentes communications » à destination des demandeurs d’emploi et des entreprises. Toutes les communications de Pôle emploi étaient écrites par des êtres humains. Avec France Travail, cela ne sera plus le cas.

Ce dispositif s’ajoute à ceux relevés en juin par l’association La Quadrature du Net, concernant l’essor du contrôle algorithmique à France Travail. Le collectif y détaille les algorithmes permettant de réaliser des profilages psychologiques des demandeurs d’emploi, d’évaluer leur honnêteté via un « score de suspicion » ou leur « attractivité » via « un score d’employabilité ». « Je ne vois pas le rapport entre le profil psychologique des gens et leur parcours d’emploi, si ce n’est pour permettre de délégitimer certains et dire “vous n’avez pas le profil psychologique associé à ce que vous voulez vraiment faire”. Cela va permettre à certains directeurs d’agence de faire le ménage dans les listes de demandeurs d’emploi », dénonce encore Hadrien Clouet.

Entre la sous‐traitance accrue au secteur privé et le nouveau modèle organisationnel de France Travail, les évolutions dévoilées par les documents internes consultés par Mediacités témoignent de la dégradation à l’œuvre de ce service public. Tant ses usagers et usagères que ses agent·es seront durement affecté·es par les mutations en cours. Reste à savoir si les artisans de ce saccage, notamment les député·es de l’ex‐majorité présidentielle, apprécieront à leur juste valeur ces réformes. Battu·es aux dernières élections législatives, 82 sont de nouveau sur le marché du travail et auront peut‐être affaire au descendant de Pôle emploi.

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Klaqos

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