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Avec l’ultra-cyclisme et ses courses de 1 000 kilomètres, le vélo change de braquet

6–8 minutes

Un nombre croissant de cyclistes amateurs s’essaient aux épreuves de très longue distance, en autonomie complète, qui essaiment sur le territoire. L’occasion de mêler effort physique exigeant et aventure en pleine nature.

Article réservé aux abonnés Ascension du Pas de Peyrol en région Auvergne-Rhône-Alpes lors de la course BikingMan Aura, en août 2022.

Cet été, Thibaut (il a préféré garder l’anonymat), 35 ans, n’a pas prévu de lézarder au soleil sur une serviette de plage. Ce professionnel de santé installé dans la région lyonnaise a un objectif un peu plus tonique : faire 575 kilomètres à vélo autour de l’Auvergne, se reposer un peu et, quelques semaines plus tard, enfourcher à nouveau sa bicyclette pour prendre le départ du BikingMan Aura (pour Auvergne-Rhône-Alpes), une course de plus de 1 000 kilomètres entre le Massif central et les Alpes du Nord. Le tout sans assistance, en temps limité, en autonomie totale avec des barres de céréales, et en ne s’arrêtant que pour dormir à la belle étoile… Le trentenaire envisage ces défis estivaux avec pragmatisme. « Je sais que je peux faire plus de 300 kilomètres en une journée, souligne-t-il. La course de 575 kilomètres va me permettre de tester ma capacité à rouler de nuit et à dormir à la belle étoile. Comme ça, je serai prêt pour les 1 000, l’objectif qui me titille vraiment. »

Thibaut est tombé dans l’ultra il y a un an à peine. Sportif – il pratique le ski de randonnée et la course à pied –, il n’avait jamais fait de sorties vélo de plus de 140 kilomètres. Ce qui n’est déjà pas si mal… Poussé par un ami, il s’inscrit à un GravelMan, une course organisée dans le Jura. Au programme : 350 kilomètres et 3 500 mètres de dénivelé positif – « D+ », selon la formule consacrée. L’effort, le cadre champêtre : tout lui plaît. La course GravelMan organisée dans le Jura, lors de la première édition, en juillet 2022.

Steven Le Hyaric, le fondateur des GravelMan Series – du nom du gravel, sorte de vélo qui allie route et VTT –, envisage ces courses comme « la première marche vers l’ultra-distance ». Ancien cycliste professionnel, Le Hyaric enchaîne les performances à vélo autour du monde et repousse le nombre de kilomètres. « J’ai créé ces courses partout en France pour mettre les gens en mouvement juste après le confinement. Je les sentais moroses et en demande d’aventures et d’activités de plein air. » L’intuition du sportif est bonne. Trois mille personnes ont déjà pris le départ d’une épreuve, moyennant une inscription allant de 99 à 199 euros, selon le parcours. Leur profil : « Des trentenaires ou des quadras sportifs voulant se dépasser, plutôt des CSP+ », selon les observations de Steven Le Hyaric. A noter que 30 % des participants sont des participantes. Seule condition pour prendre le départ : avoir un certificat médical et pas mal de kilomètres dans les pattes.

« Une école de patience et de résistance »

Dans son bureau d’Ambert, sous-préfecture du Puy-de-Dôme, Mathieu Debarges, 44 ans, constate, lui aussi, un vrai engouement pour l’ultra. Cet ancien responsable d’une société de fitness a participé en 2021 au lancement de l’Ultr’Arverne. Au programme, deux tracés : 575 kilomètres et 11 000 mètres de D+ (celui que Thibaut a choisi, pour se mettre en jambes) ou 871 kilomètres et 14 500 mètres de D+. Le tout en quatre-vingt-deux heures au maximum. Le départ est prévu jeudi 29 juin, à 7 heures du matin. Une petite centaine de personnes ont déjà rempli leur bon d’inscription. « Cette épreuve permet de rassembler à la fois ceux qui veulent faire de la compétition et ceux qui ont envie de vivre une aventure dans un cadre incroyable parce que vraiment, parfois, on se croirait perdu dans la Terre du Milieu », détaille Mathieu Debarges.

Christophe Aucan, 28 ans, n’a pas encore eu l’impression de pédaler sur le continent imaginaire de l’écrivain britannique J.R.R. Tolkien, mais il a, lui aussi, quelques images marquantes gravées dans sa mémoire. « Quand on a passé quinze heures les fesses collées à la selle et roulé de nuit, voir le jour se lever dans le calme de la campagne, je vous assure que c’est quelque chose. » Il envisage l’ultra comme « une école de patience et de résistance », qui consolide son tempérament calme et posé. « 95 % des moments difficiles ne sont que transitoires », confesse-t-il, philosophe. Ascension du col du Chansert dans le Puy-de-Dôme, lors de la course Ultr’Arverne, en juillet 2022.

Ancien triathlète, Christophe a eu envie de se consacrer au vélo et de se frotter aux très longues sorties. « J’ai toujours beaucoup roulé, précise ce responsable d’approvisionnement dans une usine, qui, chaque jour, se rend au travail à bicyclette et pédale 85 kilomètres. Je voulais tester mes limites et me fixer des objectifs importants. » Pour le moment, il se contente d’une grosse course par an afin que le sport n’empiète pas trop sur sa vie personnelle. « Comme c’est une activité peu traumatisante pour les articulations et moins violente que le trail, je sais que je vais pouvoir en faire encore pendant des années. » Le compteur de son vélo n’a pas fini d’engranger des kilomètres.

Tiphaine Thuillier

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this post was submitted on 18 Jun 2023
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